•  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  

AnalysePayer les athlètes pour le spectacle qu’ils offrent

Ils sourient.

Andre De Grasse et Usain Bolt à l'arrivée de leur demi-finale au 200 m aux Jeux de Rio

Photo : Getty Images / Olivier Morin

« L’important, c’est de participer. » Cette devise injustement attribuée à Pierre de Coubertin risque bientôt d'être reléguée aux oubliettes.

Pour la première fois en 128 ans d’histoire, World Athletics, la Fédération internationale d’athlétisme, a décidé de verser une prime de 50 000 $ US aux médaillés d'or des prochains Jeux olympiques de Paris.

L'introduction des prix olympiques en argent est un tournant pour l'athlétisme mondial. Il souligne notre engagement à responsabiliser les athlètes et reconnaît le rôle essentiel qu'ils jouent dans le succès des Jeux, a déclaré le président de World Athletics, Sebastian Coe.

Il est impossible de nommer le véritable prix d'une médaille olympique et l'effort nécessaire pour représenter son pays aux Jeux olympiques. Mais il était important pour nous de commencer quelque part. C’est pourquoi nous avons décidé de partager une partie des bénéfices avec les athlètes qui font des Jeux olympiques un si grand événement, a conclu le président.

Ils se tiennent côte à côte.

Le président du CIO Thomas Bach et le président de World Athletics Sebastian Coe

Photo : Getty Images / Alexander Hassenstein

Toutefois, cette initiative mise de l'avant par une fédération internationale soulève un certain nombre de questions.

Est-il besoin de rappeler que les Russes ont engagé une guerre sans merci avec le Comité international olympique (CIO)? Leur dernière création, les Jeux de l'amitié, qui doivent avoir lieu après la tenue des Jeux de Paris, est une menace directe de Moscou afin d’ébranler les colonnes du temple de Lausanne.

Le président Vladimir Poutine, qui est l’instigateur de ces Jeux, a délié les cordons de la bourse en promettant des primes d’un montant total de 100 millions de dollars. De quoi attirer les meilleurs athlètes.

La réaction assez inusitée de World Athletics est-elle une réponse pour inciter ses athlètes à demeurer dans la famille olympique? La fédération craint-elle de voir ses athlètes déserter la Diamond League? Un circuit qui est nettement moins payant que les offres alléchantes russes des Jeux de l'amitié.

À titre d'exemple, les athlètes qui remportent la finale du circuit de la Diamond League touchent 30 000 $. C’est la prime pour un médaillé d’argent aux prochains Jeux russes.

Cette première initiative du président Sebastian Coe va-t-elle faire boule de neige? Les autres grandes fédérations internationales pourraient être tentées de l’imiter. Mais pour les moins nanties, les primes russes pourraient être tentantes. Une autre nouvelle source d'inquiétude pour le CIO.

Depuis son existence, le CIO n’a jamais rétribué les athlètes ou médaillés de ses Jeux. Par contre, les caisses de la maison olympique se remplissent davantage d’olympiade en olympiade.

Certains qualifient ce système de désuet. En réponse, le CIO soutient que 90 % de ses revenus sont reversés au mouvement sportif. Le problème, c’est qu'il est impossible de vérifier cette affirmation.

Avec leurs primes alléchantes, les Jeux du futur, qui ont eu lieu en mars dernier, et les prochains Jeux de l’amitié, qui vont se dérouler en septembre, risquent de pousser les athlètes à les préférer aux Jeux olympiques.

Ils risquent aussi de déstabiliser le sport mondial tel qu’on l’a connu jusqu’ici. Un nouveau jeu avec une nouvelle redistribution des cartes se dessine de plus en plus et World Athletics l’a bien compris.

Il ne serait pas un hasard, d’ailleurs, de voir les primes de la Diamond League augmenter de manière substantielle.

Ils discutent.

Vladimir Poutine et Thomas Bach

Photo : Getty Images / Pool

Les menaces du CIO envers les athlètes et les pays qui voudraient se présenter aux prochains Jeux de l’amitié sont aussi le signe de l’inquiétude du président Thomas Bach.

Rappelons qu’en novembre 2023, James Macleod, le directeur des relations avec les comités nationaux olympiques du CIO, avait lancé cette mise en garde : Les comités nationaux olympiques doivent faire preuve de prudence à l’égard de ces jeux alternatifs, et un rapprochement avec le régime russe irait à l’encontre de l’objectif collectif du mouvement olympique de maintenir l’indépendance et l’autonomie du sport.

Le maître du Kremlin a bien compris que ses Jeux menacent sérieusement ceux du maître de la maison olympique. Il semble restaurer une nouvelle guerre froide sportive et, comme sur le terrain politique, il veut que la grande Russie reprenne la place longtemps occupée par l’Occident.

Il pense que le sport peut être l’outil de cette désoccidentalisation. Un terme employé par le spécialiste de la géopolitique de la Russie, Lukas Aubin, dans une récente chronique dans le journal La Croix.

En ce moment, le président Poutine avance ses pions sur l’échiquier sans craindre véritablement les répliques de son adversaire Thomas Bach. Une transposition que l'on peut aisément faire avec sa réaction face aux menaces occidentales depuis l'invasion de l'Ukraine par son armée.

À ce jeu, qui sera échec et mat? L’avenir nous le dira.

Vous souhaitez signaler une erreur?Écrivez-nous (Nouvelle fenêtre)

Vous voulez signaler un événement dont vous êtes témoin?Écrivez-nous en toute confidentialité (Nouvelle fenêtre)

Vous aimeriez en savoir plus sur le travail de journaliste?Consultez nos normes et pratiques journalistiques (Nouvelle fenêtre)

Chargement en cours

Infolettre Sports

Analyses, chroniques et bien plus encore! Suivez l’actualité sportive au-delà des résultats.

Formulaire pour s’abonner à l’infolettre Sports.